COMMISSION DE PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES

S’assurer que tout ce qui permet d’identifier une personne physique soit sécurisé et confidentiel.

Le droit à l’oubli

Jean Frayssinet[1] disait que l’individu ne doit pas être gêné « toute sa vie durant par des informations fichées et utilisées à son insu[2] ».

Le droit à l’oubli est le sujet qui fait plus de débat actuellement par rapport à la protection des données à caractère personnel des internautes. Si la quasi-totalité des autorités de contrôle font la plaidoirie, ce droit à l’oubli est loin de faire l’unanimité et entraîne, en premier lieu, de vives réactions de la part des historiens et des archivistes. En effet, pour eux, droit à l’oubli est synonyme de droit d’effacer le passé. Aussi, la destruction des données personnelles après leur temps de conservation nécessaire à leur utilisation s’annonce comme le point litigieux.

Par un arrêt symbolique du 13 mai 2014, la Cour de justice de la Communauté européenne (CJUE) consacre le droit l’oubli numérique. Cette décision constitue un tournant décisif pour l’application du droit à l’oubli imposée aux moteurs de recherche tel que Google.

Cependant aucune disposition de la loi sénégalaise n°2008-12 du 25 janvier 2008 portant sur la protection des données à caractère personnel ne mentionne expressément le droit à l’oubli d’où la difficulté de définir cet ensemble. La doctrine se fonde notamment sur son corollaire le droit à l’effacement  pour faire application de ce droit.

En quoi consiste ce droit à l’effacement ?

Le droit à l’effacement des données à caractère personnel comprend deux facettes :

  • l’interdiction pour les responsables de traitement de conserver les données plus que nécessaire ;

Cette obligation est énoncée aux articles 35 et 72 de la loi n°2008-12 précitée qui prévoient que «les données personnelles ne doivent être conservées pendant une durée qui excède  la période nécessaire aux finalités pour lesquelles, elles sont collectées ou traitées. Au-delà de cette période requise, les données ne peuvent faire l’objet d’une conservation qu’en vue de répondre à des fins historiques, statistiques, ou de recherches en vertu des dispositions légales».

Au regard de ces dispositions, les données à caractère personnel ne peuvent être conservées en mémoire éternellement car chacun a droit à l’oubli. Il faut en effet fixer une date de péremption en fonction de l’objectif assigné au fichier. En termes concrets, la durée de conservation, doit être en adéquation avec la finalité du traitement. 

  • le droit de demander l’effacement de ses données.

Cette possibilité est prévue par l’article 69 de la loi sur les données personnelles qui prévoit que « toute personne physique justifiant de son identité peut exiger du responsable d'un traitement que soient, selon les cas, rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel la concernant, qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l'utilisation, la communication ou la conservation est interdite ».

Si les coordonnées du responsable de traitement ont dû être transmises lors de la collecte des données. C’est à lui qu’il faut faire la demande de suppression.

Il est possible en cas de refus de celui-ci d’informer la CDP.

La vie privée et la liberté d’expression sont des droits fondamentaux de valeur équivalente. Lorsqu'ils entrent en conflit, ils doivent être mis en équilibre dans chaque cas d’espèce, sous l'autorité du juge, l’un ne pouvant prévaloir sur l’autre par principe.

Les principaux enseignements à tirer de la jurisprudence de la CJUE :

  1. 1.      Un internaute peut s’adresser directement à un moteur de recherche pour obtenir la suppression des liens vers des pages Web contenant des informations portant atteinte à sa vie privée, sans avoir à s’adresser au préalable à l’éditeur du site Internet et alors même que la publication des informations sur les sites concernés serait, en elle-même, licite.
  2. 2.      Un droit de demander la suppression non absolu : L'exercice de cette faculté est conditionné à la recherche d'un équilibre entre le droit au respect de la vie privée et le droit à la protection des données personnelles, et la nécessité de l'accès à l'information.

Toutefois, l'analyse du caractère potentiellement attentatoire à la vie privée de l'information doit s'apprécier selon :

  • la nature de l’information ;
  • la sensibilité de l'information pour la vie privée de la personne concernée ;
  • l'intérêt pour le public de recevoir l'information.

Par conséquent, il revient à chaque internaute de requérir auprès de l’exploitant du moteur de recherche la suppression des liens vers des données personnelles le concernant, dès lors qu’elles apparaissent inadéquates, qu’elles ne sont pas ou plus pertinentes ou sont excessives au regard des finalités et du temps qui s’est écoulé.

 

[1] Jean Frayssinet, professeur à la faculté de droit de l’Université d’Aix Marseille III, consultant en droit de l’informatique

[2]Jean Frayssinet, « Informatique, fichiers et libertés », éditions LITEC, 1992, page 74

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